Vous vous êtes déjà demandé pourquoi nos ancêtres semblaient avoir un lien plus étroit avec la magie, le « surnaturel », l'invisible ? Pourquoi les croyances, les superstitions, les expériences spirituelles, et surtout, les rencontres avec esprits et créatures étaient plus récurrentes, intenses, respectées ?
Attention ! Je n'adhère pas à la thèse de la naïveté ou bien de l'affabulation. Ces croyances étaient le terreau de la mémoire du territoire. Elles sont l'Histoire, telle qu'elle n'a jamais été racontée. La question de la foi peut entrer en jeu. Mais pas uniquement. De nos jours, certains d'entre nous possèdent une foi très ancrée, sans pour autant vivre de telles expériences.
D'où vient cette différence alors ? Cette distance vient simplement du fait que notre société a perdu sa liminalité. Dans une quête d'amélioration du quotidien, du confort, de la sécurité, nous avons perdu en liminalité.
Par exemple, nous ne connaissons plus la nuit. L'obscurité, la vraie. L'hiver, lorsque les jours sont au plus court, nous nous contentons d'allumer nos lumières électriques. Nous ne vivons plus le crépuscule, et la nuit qui s'en suit, comme nos anciens. Nous n'expérimentons plus cet entre-deux, qui était en réalité une porte ouverte sur l'invisible.
Autre exemple, la nature. Elle a été domptée et domestiquée pour n'être plus qu'un lieu de plaisance, de beauté. La nature sauvage a été effacée de même que les esprits qui y vivaient. Si les forêts ont longtemps été diabolisées, c'est justement parce qu'elles sont liminales. Le lieu de toutes les rencontres, d'ici et d'ailleurs.
En cherchant à nous élever au-delà des lois de la nature, nous avons perdu la connexion avec sa part invisible. En nous affranchissant de ses contraintes, de ses risques, nous avons perdu ses faveurs. Nous avons perdu le privilège du possible, de l’opportunité avec le subtil. Coupés d'elle, nous sommes devenus aveugle. Aveuglés, nous sommes devenus sourds.
Il existe mille et un autres exemples d'éléments qui ont mené à cette perte de liminalité (bruit constant, perte de disponibilité, de sensibilité, etc). Je ne suis pas sûre que l'on soit capable de la retrouver un jour, telle qu'elle était autrefois. Mais parfois, le temps d'une balade dans les bois à la tombée du jour, nous pouvons effleurer ce que les anciens vivaient quotidiennement, et imaginer les rencontres d’un autre monde qui pouvaient se présenter à eux...
Aujourd’hui, nous devons développer ce que l’on appelle le « witch-sight » ou bien la « seconde vue » afin d’être en mesure de retrouver un semblant de perception. De ce qui est pourtant là, sous notre nez. Nous étayons également diverses pratiques et techniques afin d’accroître notre sensibilité à l’invisible. Dans la recherche inlassable de retrouver ce qui était notre autrefois…
Les plus chanceux d'entre nous n’apercevons désormais que des ombres se mouvoir à travers les arbres, là où les anciens rencontraient le Diable.
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